Quel objectif pour le paysage ?
Quelle longueur focale ?
Pour compléter mon précédent article au sujet des différents modèles et marques d’appareils photo, je vous propose de nous pencher sur les objectifs photo et plus précisément sur le matériel destiné à la photographie de paysage.
Quelle longueur focale utiliser, quelle ouverture, le poids, l’encombrement, les avantages et les défauts selon les modèles et les fabricants.
Pour bien démarrer cet article, intéressons-nous tout d’abord à la longueur focale, en commençant par vérifier la taille du capteur de votre appareil.
En effet, la combinaison de ces deux caractéristiques qui va déterminer l’angle de champ (le cadrage).
Par exemple, un 17 mm sur un APN (Appareil Photo Numérique) plein format ne donnera pas du tout le même cadrage qu’un 17 mm sur un boitier APS-C.
Pour connaître la longueur focale qui offrira un cadrage équivalent au plein format sur un appareil doté d’un capteur de taille différente, il faut utiliser le coefficient multiplicateur… Pas de panique, c’est très simple !
Voici les coefficients multiplicateurs les plus communs :
– Canon APS-C : 1.6
– APS-C des autres marques : 1.5
– Micro 4/3 : 2
Par exemple, si j’utilise un Canon 90D qui est équipé d’un capteur APS-C et que je veux le même cadrage qu’un plein format avec un objectif 16 mm, je diviserai 16 par le coefficient multiplicateur pour savoir quelle longueur focale je dois utiliser :
16 / 1.6 = 10
Grâce à ce petit calcul, je sais donc qu’un 10 mm sur un Canon 90D donnera le même cadrage qu’un APN plein format équipé d’un 16 mm.
Si à l’inverse, j’utilise un appareil APS-C Canon avec un objectif de longueur focale de 300 mm, et que je souhaite passer sur du matériel « Plein Format », il faudra multiplier la longueur focale par le coefficient multiplicateur pour savoir quel objectif dois-je acheter pour avoir le même cadrage qu’avec mon matériel actuel :
300 x 1.6 = 480 mm
Si vous désirez en savoir davantage sur la taille des capteurs et les coefficients multiplicateurs, je vous invite à lire mon article sur le sujet (mais je précise que c’est assez technique).
- L’ultra-grand-angle
Techniquement, sur un appareil plein format, on parle d’ultra-grand-angle (UGA) lorsque la longueur focale est inférieure à 24 mm.
À mon sens, ces objectifs sont un excellent choix pour la photographie de paysages.
Ils permettent de capturer une grande partie de la scène, mais surtout d’intégrer facilement un premier plan et de créer des effets de perspective saisissants qui rendent les images très immersives.
Par exemple, sur cette photo, j’ai pu photographier la cascade tout en intégrant les racines au premier plan parce que j’ai opté pour un cadrage vertical avec un UGA de 17 mm.
-
Téléobjectif
Sur un appareil plein format, on parle de téléobjectif lorsque la longueur focale dépasse 50 mm environ.
Dans certaines situations, les sujets les plus intéressants d’une scène sont relativement éloignés et l’utilisation d’un objectif grand-angle ou ultra-grand-angle n’est pas adaptée.
Dans ces cas de figure, un téléobjectif peut donner d’excellents résultats.
Par exemple, j’ai photographié le Grand Teton aux États-Unis avec un 150-600 mm à 213 mm.
Zoom ou focale fixe ?
Sur internet, on voit beaucoup de débats autour de ce sujet et certains photographes ne jurent que par les zooms et d’autres utilisent exclusivement des focales fixes. Ces dernières ont plusieurs avantages et sont généralement :
– Plus compact et léger
– Muni d’une plus grande ouverture
– Doté d’une meilleure qualité optique
Cependant, certains zooms sont franchement excellents et certaines focales fixes sont médiocres. Je vous conseille donc de regarder des tests des objectifs qui vous intéressent avant de faire votre choix.
-
La perspective
Pour finir, sachez que la perspective dépend de la distance qui nous sépare d’un sujet et non de la longueur focale de l’objectif ou de la taille du capteur utilisé. Pourtant, lorsque la longueur focale est courte, on peut intégrer dans le cadre des éléments très proches de nous ce qui aura pour effet d’accentuer l’impression de profondeur dans l’image. La perspective semble accentuée et nous transmettons un message différent dans notre photo, le sentiment qu’une grande distance sépare les différents plans de la photographie. Quand on utilise un téléobjectif, c’est l’inverse puisque tous les plans situés dans le cadre sont généralement éloignés de nous et la perspective semble ainsi écrasée.
Astuce : Si vous souhaitez obtenir le rendu d’un ultra-grand-angle, mais que vous n’en possédez pas, vous pouvez faire un panorama.
Quelle ouverture ?
En photographie de paysages, on utilise habituellement de petites ouvertures comme f/5.6, f/8, f/11 ou f/16. On peut par conséquent obtenir une profondeur de champ suffisamment élevée pour que tous les éléments présents dans le cadre soient nets et il est de ce fait rare d’utiliser une grande ouverture.
Par ailleurs, il faut également garder à l’esprit que plus l’ouverture est grande et plus l’objectif sera grand et lourd. Par exemple, un Canon 17-40 f/4 L pèse 500 grammes alors qu’un Sigma ART 14 mm f/1.8 pèse 1170 grammes !
Pour les appareils plein format, je trouve que les UGA (Ultra Grand Angle) f/4 sont intéressants.
En plus d’un poids et d’un encombrement réduit, ils sont généralement moins chers que les versions f/2.8.
Si vous êtes à la recherche d’un téléobjectif, les modèles f/4 et f/5.6 sont normalement bien adaptés à la photographie de paysages. Par exemple, un 70-200 f/4 peut être un choix pertinent.
Néanmoins, même si l’on utilise habituellement de petites ouvertures pour photographier les paysages, dans des cas spécifiques, il peut être intéressant d’opter pour une grande ouverture afin de flouter le premier plan ou l’arrière-plan de la scène.
Les objectifs à grande ouverture sont également plus polyvalents et mieux adaptés à l’astrophotographie ainsi qu’à la photographie de portraits et d’animaux. C’est donc à vous de voir quelle ouverture est plus adaptée à vos besoins et envies.
La qualité optique
En plus de sa longueur focale et de son ouverture, chaque objectif est plus ou moins performant au niveau optique. Ainsi, il ne faut pas seulement se fonder sur les informations d’une fiche technique pour faire son choix.
La qualité optique est un sujet particulièrement complexe et l’importance de chaque caractéristique dépend de votre pratique. Dans la suite de cette partie, on va se focaliser sur la résolution, les aberrations et les « soleils en étoile » (ou Starburst en anglais).
a) La résolution
La résolution (que l’on appelle aussi pouvoir de résolution, pouvoir de séparation, pouvoir séparateur ou résolution spatiale) désigne la capacité de l’objectif à produire des images nettes. Plus elle est élevée et plus les clichés seront détaillés et inversement.
En français, on parle également de piqué (ou d’acutance) qui désigne l’impression de netteté des images créées. Techniquement, il s’agit de la combinaison du pouvoir séparateur et du niveau de contraste de l’objectif.
À mon sens, la résolution est une caractéristique importante pour tous les types de photographie et si un objectif est médiocre à ce niveau-là, il vaut mieux généralement l’éviter. Cependant, il faut bien considérer qu’elle dépend aussi de l’ouverture utilisée.
Par exemple, certains objectifs sont d’une qualité déplorable à pleine ouverture, néanmoins, ils seront bien meilleurs, voire excellents lorsque l’on utilise de plus petites ouvertures comme f/8. Comme évoqué précédemment, c’est ce que l’on fait habituellement en photographie de paysages.
b) Les aberrations optiques
Il existe de nombreux défauts optiques et il faut bien comprendre qu’aucun objectif n’est parfait, même les modèles à plus de 10 000€…
1) Le facteur de Flare
C’est la diffusion parasite de la lumière à l’intérieur de l’objectif qui entraine une perte de contraste ainsi que l’apparition de halos dans l’image.
Ce problème est surtout visible lorsque l’on photographie une source de lumière intense comme le soleil ou un lampadaire de nuit par exemple.
Personnellement, je suis incapable de vous citer un seul objectif totalement dénué de Flare, mais les modèles récents (de ces dix dernières années environ) subissent fréquemment une perte de contraste faible lorsque l’on photographie à contre-jour.
2) Les aberrations chromatiques
Il s’agit d’un défaut optique qui fait apparaitre des franges colorées sur les contours ce qui réduit également le niveau de netteté du cliché.
Cette aberration est essentiellement visible lorsque l’on photographie des scènes très contrastées et des sujets rétroéclairés.
Sur cette photo du ciel nocturne, on voit des aberrations chromatiques bleues autour des étoiles avec un zoom à 150%.
Heureusement pour nous, on peut corriger facilement ce défaut en post-traitement dans un logiciel comme Lightroom.
Pourtant, le résultat sera un peu moins bon qu’avec un objectif qui ne souffre pas de ces aberrations.
3) Le vignettage
Le vignettage est l’assombrissement de la périphérie d’une photographie.
Cette imperfection n’a que peu d’impact sur le rendu des clichés et se corrige très simplement en post-traitement grâce aux profils de correction.
4) La distorsion
La distorsion est une aberration géométrique qui déforme l’image vers l’extérieur (distorsion en barillet) ou l’intérieur (distorsion en coussinet). Tout comme le vignettage, elle se corrige aisément grâce aux profils de correction.
La distorsion
Certains objectifs souffrent d’une combinaison de distorsion en barillet et en coussinet et l’on parle alors d’une distorsion en moustache.
En général, ces aberrations optiques ne sont pas particulièrement gênantes, mais ils peuvent le devenir s’ils sont trop importants. Par exemple, un léger vignetage se corrige aisément, néanmoins si les coins du cadre sont très sombres, on verra apparaître du bruit en le corrigeant.
Pour finir, sachez également qu’il existe d’autres défauts optiques comme les aberrations comatiques et sphériques, ainsi que l’astigmatisme tangentiel et sagittal. Toutefois, ces dernières ne sont généralement pas gênantes en photographie de paysages.
c) Soleil en étoile / Starburst
Lorsque l’on photographie le soleil ou un lampadaire de nuit et que l’on utilise une petite ouverture, des rayons apparaissent autour de cette source de lumière.
Ce phénomène est dû à la diffraction de la lumière et le nombre de rayons dépend du nombre de lamelles qui forment le diaphragme de l’objectif. Si le nombre est pair, un nombre équivalent de rayons apparaitra. En revanche, si le nombre est impair, vous verrez alors deux fois plus de rayons que de lamelles.
Bon à savoir : certains constructeurs réalisent un travail d’orfèvre sur les lamelles du diaphragme afin d’obtenir un rendu très esthétique, c’est le cas de Canon avec le 16-35 f4 et le 16-35 f2,8.
La monture et la marque
Lorsque vous cherchez un objectif pour votre appareil, il faut évidemment vérifier que celui-ci est bien compatible avec la monture que vous utilisez. J’ai d’ailleurs écrit une liste des montures présentes sur le marché dans un des articles précédents.
Il faut aussi noter qu’aujourd’hui, certains des meilleurs objectifs du marché ne sont pas fabriqués par les plus grandes marques comme Canon, Nikon ou Sony. En effet, des entreprises comme Sigma et Tamron produisent d’excellents produits et c’est pourquoi je vous invite à regarder ce que proposent toutes les marques avant de faire votre choix.
La compatibilité avec les filtres
En photographie de paysages, il peut être très intéressant d’utiliser des filtres dans certaines situations, mais il faut savoir que tous les filtres ne sont pas compatibles avec tous les objectifs.
La majorité des objectifs sont compatibles avec les filtres circulaires qui se vissent à l’avant, mais ce n’est pas le cas des modèles dont la lentille frontale est bombée, comme le Sigma ART 14 mm f/1.8 par exemple.
Cependant, vous pouvez toujours opter pour un système de porte-filtres pour mettre des filtres sur ce type d’objectif. D’ailleurs, il existe également des filtres clip qui se placent entre le capteur et l’arrière de l’objectif.
Cependant, vous pouvez toujours opter pour un système de porte-filtres pour mettre des filtres sur ce type d’objectif. D’ailleurs, il existe également des filtres clip qui se placent entre le capteur et l’arrière de l’objectif.
La tropicalisation
Quand on photographie les montagnes, plaines et forêts, on est souvent confronté à des conditions difficiles. Je me suis retrouvé sous la neige et la pluie à de nombreuses reprises et dans ces situations, il est conseillé d’utiliser du matériel tropicalisé (qui résiste aux intempéries).
Néanmoins, il faut bien comprendre qu’un objectif (ou un appareil) tropicalisé n’est pas étanche pour autant. Ensuite, je vous conseille donc de faire très attention et éventuellement de faire l’acquisition d’une housse de pluie.
La stabilisation
Personnellement, je travaille beaucoup avec un trépied lorsque je photographie les paysages et c’est ce que je vous conseille aussi de faire dans la majorité des situations. Toutefois, si vous devez travailler à main levée, la stabilisation optique est un atout majeur et vous permettra de faire des photos nettes même lorsque vous utilisez des temps de pose relativement longs. Globalement, la stabilisation est plus importante sur les téléobjectifs que sur les UGA, mais elle peut être bénéfique sur tous les types d’objectifs.
Où trouver les bonnes informations ?
Il est souvent difficile de savoir si tel ou tel matériel est performant et s’il correspond réellement à vos besoins. En revanche, heureusement pour nous, il existe de nombreux sites et chaines YouTube qui testent le matériel photo.
Pour avoir des informations techniques et scientifiques sur les performances des objectifs, vous pouvez vous diriger vers DxO Mark ou Lenstip. Je ne peux que vous recommander de regarder plusieurs tests différents avant de faire votre choix.
Le combo parfait ?
Par ailleurs, nous avons donc vu ensemble tous les points à ne pas négliger afin de choisir le bon matériel, je vais maintenant vous dire spécifiquement lesquels sont selon mes critères sont les plus intéressants. Comme évoqué précédemment, dans certaines situations, il est préférable d’opter pour un UGA et dans d’autres un téléobjectif produira de meilleurs résultats, idéalement il est important de posséder ces deux types d’objectifs.
À mon sens, un combo presque parfait est un Canon 16-35 f/4 IS L avec un Canon 70-200 f/4 IS L II. Ces deux zooms sont légers et compacts, disposent d’une très bonne qualité optique, sont compatibles avec les filtres circulaires, tropicalisés et dotés de stabilisation optique.
Concernant les autres constructeurs et montures, en faisant quelques recherches, vous trouverez du matériel équivalent.
Cependant, nous avons tous un budget et des besoins différents et l’on peut évidemment faire de très belles photos avec de nombreux objectifs différents.
Pour conclure cet article au sujet des objectifs orientés photographie de paysages, je pense qu’il est important de rappeler que le photographe est bien plus essentiel que le matériel. Par exemple, j’ai déjà vu d’excellentes photos réalisées avec du matériel d’entrée de gamme, comme des 18-55 par exemple.
Néanmoins, il est également vrai que c’est un avantage, mais également un plaisir de travailler avec du matériel performant et adapté à ses besoins. En espérant que cet article vous aura plu et qu’il vous aidera dans votre choix.
Bonjour
Que pensez-vous des objectifs « manuels » c’est-à-dire sans autofocus tels que ceux produits par Irix, Tokina, Samyang,…?
Bonjour, personnellement j’utilise un Samyang 14 mm f2.8 tout manuel. Pour le paysage, les aurores boréales, la Voie lactée et j’en suis très satisfait. J’ai vu le 15 mm de chez Irix à l’œuvre et je l’ai trouvé plutôt convaincant.